Albus Conseil
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Le temps faible, meilleur ami de vos projets

Le temps faible, meilleur ami de vos projets
Le temps faible, meilleur ami de vos projets

/Manager le changement

Quand on regarde un planning de projet, on a souvent l’impression d’un sprint asphyxiant pour aller du constat aux livrables. On se donne quelques mois pour résoudre un manque ou un dysfonctionnement souvent historique, et toutes les semaines sont exploitées. Sauf que, dans les faits, c’est toujours plus long, souvent plus difficile et malheureusement moins pérenne qu’annoncé. Et si on rajoutait de l’oxygène dans tout ça ?


Pourquoi met-on toujours les projets dans des seringues ?

Cela est vrai quelle que soit l’entreprise, le type de projet ou son responsable, c’est comme un réflexe : quand on lance un projet, on lance une course. D’abord parce que quand on planifie un projet, on regarde ce qu’il faut faire pour réussir sans tenir compte de l’environnement, de ses limites et de ses contraintes. On se projette toujours dans un futur idéal où il n’y aura ni grève, ni crise, ni imprévu.

Il faut l’avouer, c’est difficile de se dire « oui mais dans les 3 prochains mois, il y aura bien une crise logistique qui nous occupera tous pendant une semaine ». Pourtant, c’est ce qui arrive (ça ou autre chose) et fait exploser les prévisions.

Ensuite, il y a le volontarisme parfois un peu mégalo mais surtout très courtisan des responsables de projet qui veulent faire plaisir au chef. On sait que son/sa supérieur(e) voudrait un livrable ambitieux et rapide et on a très envie de lui faire plaisir. Résultat, alors même parfois que le sujet traîne depuis plusieurs années et que l’on a mis un semestre à se mettre d’accord, on promet un aboutissement en trois mois. Satisfaisant sur le coup, mais intenable.

Enfin, on constate que l’on prend souvent les gens pour des machines, qui n’auraient besoin ni de temps ni d’itérations pour se mobiliser ou se mettre d’accord. Et pourtant, il ne suffit pas d’appuyer sur un bouton pour que s’obtienne l’adhésion.


L’action intensive appauvrit l’efficacité des projets

Comme en agriculture, l'action intensive sur les projets appauvrit l'énergie disponible et crée un nombre incalculable de difficultés. Cela génère de la tension car au fur et à mesure que les jours défilent, on se rend compte que le projet prendra, comme toujours, plus de temps qu’on ne le pense, et commence alors le doute des parties-prenantes, la démobilisation et parfois la recherche de coupables.

Au-delà de cela, un timing trop serré et des étapes qui s’enchaînent laissent moins de place au co-développement des solutions, qu’on tend à imposer pour aller plus vite, on a moins de temps pour prendre des initiatives ou tester des options différentes.

A force de vouloir tenir le timing, on finit alors par préférer finir vite un projet dégradé plutôt que de prendre le temps de le mener à fond. Quitte à ce que le projet ne change rien et que son action ne dure pas, on préfère sauver la face. 


Et si on assumait les temps faibles, voire les temps morts ?

Fort de tous ces constats, nous vous conseillons de fractionner vos projets. Comment ? en injectant régulièrement des temps faibles dans le planning de vos projets, comme une terre que l'on laisse une saison en jachère pour renouveler son sol.

Anticiper des moments où vous savez que les gens auront la tête à autre chose, et pas qu’au mois d’août, en fonction des saisonnalités de votre entreprise. Assumer aussi que certaines étapes nécessitent de convaincre et de mobiliser des gens et que ce ne sera probablement pas simple, qu’il faudra y revenir à plusieurs fois.

Accepter enfin une règle universelle et qui a même un nom désormais, la loi de Hofstadter, expliquant avec humour qu’il est quasiment impossible de prévoir le temps nécessaire à la réalisation d’une tâche complexe : « Cela prend toujours plus de temps qu’on ne le pense, même en tenant compte de la loi de Hofstadter ».

Et pourquoi ne pas aller jusqu'à intégrer un temps mort dans le projet ? Cela peut être très utile pour ancrer une avancée intermédiaire avant de passer à l’étape suivante, pour renouveler l’énergie ou la fraicheur des acteurs impliqués en les laissant faire une pause. Pour laisser les gens réfléchir, tout simplement.


A deux conditions : ne pas subir et tenir une cadence !

Ces temps faibles ou morts peuvent être bénéfiques, mais s’ils sont décidés, anticipés et annoncés. Sinon, ils génèrent des doutes chez les acteurs du projet qui imaginent que le projet est abandonné, ou a minima qu’il a du plomb dans l’aile. Mais en choisissant de programmer ces temps d’oxygénation, vous faites en sorte que tous en profitent pour recharger leurs batteries.

En créant le planning du projet, pensez-y. N’enchaînez pas deux temps forts en vous disant que « ça va passer » car ça ne passe jamais. Il est beaucoup plus facile de prévoir un calendrier aéré que de chercher de l’air en cours de route.

Si vous assumez et expliquez que vous devez tenir compte du rythme des hommes et de temps de respiration, vous ne passerez pas forcément pour un fou mais plutôt comme un homme sage et responsable.

Par ailleurs, temps faibles et temps morts ne doivent pas empêcher de garder une cadence. En n’en faisant pas des temps trop longs et en maintenant les rituels existants pour rythmer les échanges, vous en tirerez le maximum d’efficacité sans risque. Dites-vous que même si rien ne se passe, on a des choses à se dire.

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