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Managers, soyez Punk

Managers, soyez Punk
Managers, soyez Punk

/Manager dans notre monde imparfait

Managers, vous êtes écartelés sur le terrain entre vos convictions (ce que vous aimeriez faire) et ce que l’on vous demande de faire ? Vous êtes soumis à la pression du résultat court terme alors que vous savez que la performance est un sport d’endurance ? Vous êtes mis sous pression et vous aimeriez éviter de mettre sous pression votre équipe ? Alors le diagnostic est simple : vous êtes managers au XXIème siècle ! Et le remède idéal : être punk !


Le système mondial actuel n’est pas tout noir

A écouter les gens se plaindre de notre système, de nos élites, de nos médias, des actionnaires court termistes, des logiques financières, des contraintes venues du central, on en finit par se dire que nous vivons dans un monde pour le moins décadent…

Mais c’est une caricature, et une expression du penchant humain à regarder d’abord le verre à moitié vide.

Notre système est aussi le plus pluriel qui n’ait jamais existé, notamment avec l’explosion des moyens de communication, les libertés n’ont probablement jamais été aussi fortes, notamment parce que l’accès à l’information n’a jamais été aussi libre. Le système libéral n’est pas seulement cynique. Il est cynique ET généreux. Il engendre violence ET bienveillance. Il sait être court terme ET long terme. Le système libéral est vertigineux parce qu’il s’adapte à tout, digère tout : à Montreuil par exemple, il y a une boulangerie anarchiste auto-gérée, une mutuelle municipale ET des cadres de grandes entreprises, des starts-up de l’économie numérique.

La question dans ce système dur, mais libre, est donc de savoir comment utiliser cette liberté pour diriger la société (à petite ou grande échelle) dans la direction souhaitée.


En revanche, il est difficile à contester globalement

Ce qui est vrai en revanche, notamment dans les entreprises, c’est que les décisions se morcellent, s’éloignent, se globalisent et donc deviennent très difficiles à contester quand elles prennent le mauvais chemin. Il est très fréquent que des conflits sociaux s’enlisent parce que les élus exigent des décisions avec lesquelles le RH est d’accord (au moins partiellement) mais qu’il ne peut pas prendre, alors qu’il le pouvait quelques années auparavant. C’est évidemment le cas des dépenses au niveau national, qu’on ne peut plus augmenter (puisqu’il faut emprunter à l’extérieur) ou dans les entreprises, où les politiques salariales ne sont souvent plus à la main du RH local.

La contestation directe est donc de plus en plus vaine et donne le sentiment que la marche du système est absolument inéluctable.

En réalité, le système est tout à fait contestable, et probablement plus facilement qu’aux époques où les opposants pouvaient encore être matés par la force (En France il n’est pas nécessaire de remonter très loin : Rainbow Warrior en 1985, manifestant noyé dans la Seine en 1986). Seulement il ne peut être contesté dans sa globalité et sans tenir compte des multiples interactions dans le monde entier.


Comment être managers dans ce contexte

Notre manager (et notre syndicaliste d’ailleurs) doit donc revoir sa méthode de contestation et de résistance. Aujourd’hui, elle doit reposer sur les actes citoyens, sur le fait de faire différemment pour inspirer les autres, et finalement changer les décisions globales. Le changement est plus que jamais dans les mains de chacun qui doit trouver dans ses degrés de liberté, évidents ou oubliés, les leviers de défense de ses convictions.

Evidemment en temps que managers, le problème est plus aigu encore que pour le citoyen : parce que vous êtes de fait une partie de ce fameux système avec un impact sur un groupe de gens : autrement dit, si vous vous plaignez du court termisme ambiant, mais que vous le transmettez à vos équipes, vous souffrez peut être du problème, mais vous en faites partie.

La position du manager est donc probablement de moins en moins tenable, entre un système à contester mais une contestation plus dangereuse encore que le mal.


La solution, le retour au Punk

Ce n’est pas une blague, même si bien évidemment la crête rouge reste facultative. Le mouvement Punk est une contestation par les actes et non pas par des valeurs dogmatiques : le mouvement Punk est une philosophie qui prône le fait de se construire ses propres valeurs et de les défendre, sans se soucier du qu’en dira-t-on. On n’a jamais vu un punk exiger de vous de porter les mêmes vêtements que lui. En revanche, il revendique le droit de les porter lui même.

Nous croyons beaucoup à cette subtilité pour le manager d’aujourd’hui : ne pas prendre les valeurs de l’entreprise toutes crues, mais comprendre ses propres valeurs, et se battre pour les faire vivre au quotidien. Si les valeurs de votre entreprise sont contraires aux vôtres, quittez la. Si elles sont différentes sans être opposées, alors agissez au quotidien en fonction de vos valeurs, et revendiquez le droit de le faire, sans les imposer aux autres. 

Le manager Punk est un manager qui apprend à utiliser les libertés du système pour faire exister ses valeurs et se soucie peu de savoir s’il plaît aux autres, ni si tout le monde fait comme lui. Il est plus danois (les danois sont les plus vertueux en matière d’écologie sans se soucier de leur impact à l’échelle de la planète) que français (qui aimeraient beaucoup que le monde leur ressemble sans forcément se soucier de respecter eux mêmes les vertus qu’ils prônent). 

Le manager Punk qui croit au long terme et veut développer ses équipes, peut le faire dans notre système, contrairement à ce que l’on dit souvent ; il va organiser des échanges sur la carrière des équipes (qui l’en empêche ?), programmer des moments de réflexion sur le long terme (qui le lui refusera ?), envisager les actions sur 2/3 ans plutôt que sur 1 (qui le contestera ?)

En revanche le manager Punk ne passera pas ses journées et son énergie à se plaindre que les actionnaires veulent des résultats cette année (vont-ils changer ?), ne va pas rebalancer les objectifs qu’on lui donne sans les expliquer, les critiquer, les adapter à la réalité.


Mes Punks à moi

Dans notre podcast sur la vision, nous classons De Gaulle dans cette catégorie, parce qu’il résiste malgré la capitulation, parce qu’il ne s’aligne pas avec les États Unis malgré les pressions, parce qu’aussi il résiste aux progrès sociaux malgré les demandes de la rue…Le Punk n’a pas toujours raison…

Dans les entreprises, il y a des exemples de Punk, nombreux :

  • Un directeur de Raffinerie qui refuse d’afficher un objectif de 0 accident, inaccessible… et qui bat un record historique 1 an plus tard.
  • Un DRH de la même usine qui dit : faites ce qu’il y a à faire, et si nous avons des contestations, je défendrai les convictions que je partage.
  • Un patron de réseau de distribution qui défend des objectifs de moyens, des primes collectives, face à un système qui exige des résultats court terme et 100% CA/renta.
  • Une patronne de site qui défend sa vision de son site et ose se faire mal voir de sa hiérarchie (et freine sa carrière) mais fait de son usine la meilleure de son groupe en moins de 5 ans (et on partait de loin).
  • Une manager qui dit la vérité à ses équipes, un autre qui préfère dépasser ses droits pour pouvoir donner plus de sens, un qui refuse de virer son n-1 dont tout le monde veut la peau parce qu’il croit encore en lui, un autre qui va chercher son fils à la fin de la journée, et tant pis pour les réunions après 18h.

Il y a beaucoup de contraintes dans les entreprises, mais un grand nombre sont aggravées par notre docilité, et une résignation injustifiée. Avant de faire du reste du monde les coupables, le Punk s’aligne avec ses propres visions.

Et pour ceux qui s’inquiètent de la dimension anarchique du mouvement Punk, rassurez vous : le monde du XXIème est probablement le plus proche de l’anarchie dans l’histoire de l’humanité, d’où probablement le regain d’intérêt pour les fascismes. Mais avant d’avoir recours au remède le plus inquiétant qui soit, tâchons de profiter de la liberté que nous avons pour défendre les valeurs auxquelles nous croyons, par les actes, pas par la morale.

Punks not dead.

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